Pour sa deuxième année à la tête du Bayern, Carlo Ancelotti ne s’attendait sans doute pas à un climat aussi peu serein du côté de la Säbener Strasse, le centre d’entraînement du Bayern Munich. Côté sportif, seule la défaite 2-0 à Hoffenheim est venue troubler le début de saison du FCB, bon sur le plan des résultats mais insatisfaisant sur le contenu (trois victoires en Bundesliga, un succès en Ligue des Champions face à Anderlecht et a un trophée remporté en Supercoupe d’Allemagne contre Dortmund). Pourtant c’est bien l’extra-sportif qui fait la Une des journaux de l’autre côté du Rhin. Surnommé dans les années 90 le FC Hollywood pour ce type de frasques, le mastodonte germanique semble de nouveau replonger dans cette période agitée.
Une direction pas sur la même longueur d'onde
Les problèmes en dehors du terrain ont commencé lorsque Robert Lewandowski, attaquant star du club bavarois, a donné une interview à Der Spiegel qui n’avait pas été autorisé par la direction, comme il est de coutume en Allemagne. Dans cet entretien, l‘international polonais critiquait le manque d’ambitions du Bayern dans sa politique de transferts. Il n’en fallait pas plus pour que le grand patron Karl-Heinz Rummenigge recadre le joueur de 29 ans dans Bild. "Je regrette ces paroles. Un joueur qui critique l’entraîneur, le club ou ses coéquipiers aura affaire directement à moi."
On aurait pu croire que l’affaire en resterait là mais Uli Hoeness, revenu au club depuis plus d’un an après sa condamnation pour fraude fiscale, a eu un tout autre avis. Pour lui "l’interview n’était pas trop mauvaise" prouvant ainsi qu’il y a des désaccords sur le fond au sein du Bayern, à propos des transferts, mais également dans la communication. La direction n’affiche pas d’unité dans des moments troubles, ce qui fragilise forcément le club. Pendant la mise à l’écart d’Hoeness, Rummenigge a pris de plus en plus d’importance à la tête du Bayern. Le retour du Champion du Monde 1974 provoque inévitablement un choc d’égos que le club a du mal à gérer pour l’instant.
Un vestiaire peu soudé
Pour parler un peu plus des joueurs, il est connu du grand public depuis plusieurs mois que Robert Lewandowski et Arjen Robben ne sont pas les meilleurs amis du monde. Cela s’est reflété lors du match contre Anderlecht en C1 où les deux hommes ont très peu communiqué entre eux. Une action révélatrice a interpellé les observateurs en seconde période : Lewandowski a préféré y aller seul alors qu’il aurait pu servir un caviar au Néerlandais.
En interviews d’après-match, Robben et Boateng ont estimé qu’il fallait améliorer la cohésion au sein de l’équipe. L’ailier de 33 ans en a même profité pour adresser une petite pique à son coéquipier polonais sans le citer. "Il va falloir que nous nous posions tous des questions. Nous ne devons pas tant parler, c'est sur le terrain qu'il faut prouver." Suite à la prestation décevante en Ligue des Champions malgré le succès 3-0, les joueurs ont eu une grosse discussion entre eux. La claque infligée à Mayence samedi (4-0) est une belle réaction pour évacuer les doutes.
Carlo Ancelotti directement visé
Partout où il est passé, l’entraîneur italien a gagné. Que ce soit à Chelsea, à l’AC Milan en passant par le PSG et le Real Madrid, le "Mister" a cultivé l’image d’un vainqueur et d’un technicien très respecté. En Bavière, ce statut semble légèrement mis à mal et directement par des légendes du club. Paul Breitner a estimé que "le Bayern a fait un pas en arrière" depuis la prise en main par Ancelotti, à l’été 2016. Quand on sait que les illustres anciens s’en étaient déjà pris à Pep Guardiola, ces critiques n’ont rien d’étonnantes.
De son côté, l’entraîneur de 58 ans a voulu désamorcer la situation il y a une semaine en indiquant qu’il n’envisageait pas de quitter tout de suite le Bayern. "Je veux dire que je suis heureux d'être ici et je le serai aussi jusqu'à la fin de mon contrat. Après ça, j'espère que nous pourrons continuer ici. Si ce n'est pas le cas, je devrais trouver une autre solution." Le vainqueur de la Ligue des Champions en 2003, 2007 et 2014 a souvent eu affaire à des gros égos au cours de sa carrière mais ceux du Bayern, notamment de sa direction, représentent un tout autre défi.